Procès de l'agence immobilière Alvimmo pour discrimination à la location

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Le lundi 28 mai 2018 a eu lieu une audience importante devant la chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Paris pour décider du renvoi devant le Tribunal Correctionnel d'Evry des dirigeants de l'agence Alvimmo de Palaiseau (Essonne) pour discrimination raciale contre des demandeurs de logement.

Au point de départ, une chargée de clientèle qui travaillait dans cette agence est venue voir Samuel Thomas, alors vice-président de SOS Racisme, le 10 janvier 2006. La cause de sa venue est qu'elle ne supportait pas de devoir, depuis 3 mois qu'elle était embauchée, écarter systématiquement les bons dossiers des candidats noirs, arabes ou asiatiques, à cause du racisme de son patron.

Les 12 et 13 janvier 2006, avec une caméra cachée de France 3 pour l'émission "Pièces à conviction" de la journaliste Élise Lucet, nous avions réussi à enregistrer le patron de l'agence Alvimmo de Palaiseau quand il donnait pour ordre à sa chargée de clientèle d'écarter toute personne "noire, arabe ou jaune" des offres locatives de l'agence.

Le 21 février 2006, 3 jours après le passage du reportage sur France 3, SOS Racisme saisissait le procureur de la République d'une plainte afin que les preuves soient préservées. L'association transmettait une liste d'une dizaine de victimes de discriminations, candidats à la location entre novembre 2005 et janvier 2006. 

Voici le sujet passé sur France 3 le 24 février 2006 

https://www.youtube.com/watch?v=lllEV7MnaIY

Ensuite, la Maison des Potes s'est constituée partie cvile auprès du juge d'instruction pour lui fournir la vidéo complète de l'opération en caméra cachée, que voici : 

https://www.youtube.com/watch?v=838ikWS1_u4

Pendant 10 ans, le juge d'instruction qui rendait des non-lieux a refusé d'entendre Samuel Thomas, le vice-président de la Maison des Potes à l'époque, et qui était auparavant vice-président de SOS Racisme et qui était aussi l'organisateur de l'opération de testing en caméra cachée. Le juge avait refusé de prendre en compte la preuve des ordres de discriminations apportée par l'enregistrement réalisé les 12 et 13 janvier 2006. 

Pendant 12 années d'instruction, les magistrats instructeurs et les procureurs ont refusé de donner à tous les faits énoncés leurs bonnes qualifications, à savoir une subordination d'offre location à des critères discriminatoires. Au lieu de prendre en compte le fait que le délit premier était d'avoir interdit la location aux "noirs, arabes et jaunes" à ses chargées de clientèle, c'est-à-dire pour des dizaines et des centaines d'offres locatives, les magistrats n'ont voulu retenir que le délut d'avoir refusé des locations à une poignée de victimes identifiées dont le dossier complet et parfait avait finalement été écarte alors qu'ils étaient les premiers candidats les plus solvables.

L'enjeu pour la Maison des Potes lors de cette audience à huit clos était de convaincre les magistrats de la Cour d'appel de redonner à tous les délits commis leurs correctes qualifications et de faire en sorte que la société Alvimmo, et pas uniquement les personnes physiques, soit renvoyée devant le TC d'Evry, plus de 12 ans après les faits.

Le 2 juillet 2018, la chambre de l'instruction a infirmé le non-lieu du juge d'instruction et a ordonné le renvoi des dirigeants de l'agence immobilière Alvimmo devant le TC d'Evry pour discrimination. 

Le 6 février 2019, les deux co-gérants de l'agence immobilière Alvimmo, Guy et David Auvray, ont été condamnés pour discrimination raciale par le TC d'Evry. Ils ont été condamnés à verser 5000€ au titre de dommages et intérêts et frais de justice à la Maison des Potes-Maison de l'Egalité, à SOS Racisme et à la LICRA. Ils ont aussi été condamnés à des peines de prison avec sursis entre 2 et 4 mois de prison pour les deux co-gérants de l'agence.

A noter que le procureur de la République avait réclamé une condamnation pour les deux dirigeants à 3000€ d'amende et 8 mois de prison avec sursis pour discrimination raciale pour les deux dirigeants.

Pour Samuel Thomas, président de la Maison des Potrs-Maison de l'Egalité "C'est une grande victoire, même si la sanction n'est pas suffisante au regard de l'ampleur des actes de discrimination commis par ces dirigeants."